Depuis plusieurs mois, les réseaux sociaux, les caricaturistes et même des émissions de télévision multiplient les moqueries autour du fauteuil roulant du président Bouteflika.
Flora Bouberghout est présidente de l’Association nationale de soutien aux personnes handicapées. Dans cet entretien, elle se dit scandalisée par ces moqueries.
« Je ne trouve pas ça normal, étant moi-même une personne en situation de handicap. Je porte des prothèses et des broches, et à l’instar d’autres handicapés, j’ai été scandalisée par cette représentation, cette stigmatisation d’une tranche importante de la société. Un handicapé est une personne à part entière, égale à un autre. Nul n’est à l’abri d’un handicap. On peut tout à fait accéder à la magistrature suprême en étant sur une chaise roulante, on peut être actif dans tous les domaines pourvu que nous ayons les capacités requises. On a, bien entendu, noté le nombre des préjugés à tous les niveaux. Quels messages voudraient-ils passer ? Vous handicapés, sur une chaise roulante, restez chez vous ? On entendait tous les jours des gens dire du Président : « Oui, mais il est sur un fauteuil roulant ! Mais l’un n’empêche pas l’autre ! On peut être aussi efficace qu’une personne valide. Ça nous a fait beaucoup de mal, pas parce qu’on a caricaturé le Président, c’est bien le fauteuil roulant qui a été caricaturé ! »
Que pensez-vous de la multiplication de ces moqueries pendant et après les présidentielles ?
Ces attaques sont condamnables et inadmissibles. Nous sommes quand même deux millions de personnes handicapées et nous subissons ce regard, cette intolérance, cette marginalisation. Nous sommes actifs sur tout le territoire national et nous avons constaté que cette intolérance et cette marginalisation sont répandues. Nous savons que c’est à nous – société civile – de changer cela, d’agir sur ces mentalités et d’essayer de les faire progresser, et aussi d’inviter les gens à accepter cette différence. Ce sont des tabous qui doivent tomber aujourd’hui ! Nous sommes aussi marginalisés dans les projets du pays. Par exemple, on a construit le métro d’Alger sans tenir compte de l’accessibilité des personnes handicapées. Pour ce qui est du vote, les personnes handicapées ne jouissent-elles pas de l’autonomie suffisante pour accomplir leur devoir ? On note quotidiennement que nous sommes les laissés pour compte de la société. J’espère que, dans ce quatrième mandat, les choses évolueront, car il ne faudrait que rien ne soit construit à l’avenir sans la prise en compte de cette grande tranche de la société.
Allez-vous mener des campagnes de sensibilisation ou dénoncer ces représentations ?
On a été en vacance pendant la campagne électorale, mais nous comptons dès à présent dénoncer ces caricatures blessantes de la chaise roulante. Face à ce manque de tolérance, nous devons agir, car c’est à nous qu’incombe cette tâche, à travers des plaidoyers, des communications, des sensibilisations, et ce, aussi bien auprès des médias qu’au niveau des écoles, des entreprises et de l’environnement.
Autor: Selma Kasmi
Source/Fuente: http://www.tsa-algerie.com/2014/04/22/les-handicapes-scandalises-par-la-...
