A Alger, les citoyens ont le regard ailleurs

Fuente: 
El Watan
Fecha de publicación: 
24 Mar 2014

En dehors du siège de l’UGTA et de quelques permanences des candidats, notamment celles de Bouteflika, les traces d’un début de campagne sont presque invisibles.

La brume qui couvre le ciel d’Alger reflète parfaitement l’état d’esprit des habitants de la capitale. En ce dimanche de printemps, premier jour de la campagne électorale pour la présidentielle d’avril prochain, Alger peine à sortir de sa torpeur. N’était le brouhaha habituel ajouté à la pollution et le bruit provoqué par les incessants travaux de réfection des trottoirs, on se croirait au beau milieu des années 1990. En dehors du siège de l’UGTA et de quelques permanences des candidats, notamment celles de Bouteflika, les traces d’un début de campagne sont presque invisibles. Difficile d’y voir alors un intérêt de la population. «Ni je suis la campagne, ni je vote», répond spontanément une jeune, à peine la trentaine, attablé au restaurant d’un quartier populaire de la capitale.

Cet ouvrier, qui semble être informé de ce qui se passe sur la scène politique, est éloquent. «Je ne vois pas comment je pourrai aller voter alors que Bouteflika qui avait promis en 2012 de laisser place aux jeunes se représente pour un autre mandat !» dit-il, serein. Son voisin de table, ouvrier lui aussi, enchaîne : «Le plus jeune des candidats a 52 ans. Et ils osent parler des jeunes !» «Je vous dis une chose : la majorité des jeunes ne voteront pas», prédit notre interlocuteur.

Moins loquaces que les garçons, les jeunes filles ne sont pourtant pas moins désintéressées de la chose politique. «Je m’en fous de leur élection. Je ne sais même pas qui se présente. De toute façon, je ne vais pas voter. Je n’ai même pas de carte d’électrice», s’indigne Amina, qui discute avec deux copines en attendant un taxi. «Nous désespérons de ce pays où malgré nos diplômes nous n’arrivons même pas à trouver du travail», se plaint la copine d’Amina, avant de prendre congé de nous.

«Le débat est ailleurs»

D’habitude plus sages, les adultes ne sont pas tellement «branchés» sur le scrutin présidentiel d’avril. C’est le cas de Salima, une quinquagénaire, rencontrée en compagnie de sa fille au service d’état civil de la commune de Sidi M’hamed. «Je ne sais même pas ce qui se passe», dit-elle, souriante. «Voyez peut-être avec ma fille !» suggère-t-elle. «Non plus», répond la jeune fille.
Si la majorité des personnes rencontrées avouent publiquement leur manque d’intérêt, d’autres affirment voter par habitude. C’est le cas de Mohamed, la soixantaine.

L’homme, assis sur un banc public en compagnie d’un vieux maquisard, affirme, tout sourire, qu’il n’a jamais intégré un parti politique. «Je vote à chaque fois mais je ne donne ma voix à personne», a-t-il dit. Son voisin, Ramdane, 80 ans, est plus engagé. Cet ancien militant de la Fédération de France du FLN est plutôt un fidèle de l’ancien parti unique. «Oui, je vote pour la stabilité et la paix», dit-il, tout en brandissant fièrement un document d’archive de l’armée française qui l’avait arrêté en 1958 à Lyon, en France. Malgré cela, le vieil homme, appuyé sur une canne qui l’aide à marcher, reconnaît qu’il ne connaît aucun candidat. «Moi, je vote pour le candidat du FLN», a-t-il lancé.

 

Autant de témoignages qui charrient autant d’avis. Cependant, sur une dizaine de personnes rencontrées au hasard, seules deux ont affirmé prévoir de voter le 17 avril. Le reste est à inscrire dans cette masse d’Algériens qui n’iront pas voter. Pis, une bonne partie d’entre eux révèlent qu’ils ne disposent même pas de carte d’électeur. Ces gens vont pourtant être comptabilisés lorsque le ministre de l’Intérieur proclamera, le matin du 18 avril, les résultats de la présidentielle.

 

Autor: Ali Boukhlef

Source/Fuente: http://www.elwatan.com/actualite/a-alger-les-citoyens-ont-le-regard-aill...