Les délais de mise en place de la Cour Constitutionnelle: Laxisme et vide juridique

Fuente: 
Le Temps
Fecha de publicación: 
26 Abr 2015

Durant l’ancien régime il n’y avait pas de possibilité pour le citoyen de soulever l’inconstitutionnalité d’une loi ou d’un décret-loi , ni par voie d’action , ni par voie d’exception, c’est-à-dire à l’occasion d’une affaire judiciaire quelconque. Le Conseil constitutionnel n’avait qu’un rôle consultatif.

Or, parmi les acquis de la Révolution, la création d’une Cour constitutionnelle.

Selon l’article 118 de la Constitution, « la Cour constitutionnelle est une instance juridictionnelle indépendante composée de douze membres choisis parmi les personnes compétentes, ayant une expérience de vingt années au moins et dont les deux tiers sont spécialisés en droit ».

C’est donc un organe juridictionnel qui ne revêt aucun caractère politique. Ses décisions seront obligatoires et opposables à tous et sans exception. Il doit être de ce fait, indépendant, aussi bien de l’exécutif que du législatif.

Il est composé par le président de la République, le président de l’ARP et le président du Conseil supérieur de la magistrature, chacun pour un mandat limité. Ils siègent collégialement et non en chambres distinctes et choisissent parmi eux un président.

Qui peut le saisir ? le président de la République, le Premier ministre, le président de l’ARP et trente députés.

Par ailleurs et c’est là la nouveauté, la Cour constitutionnelle peut être saisie par l’un des tribunaux à l’occasion d’une question d’inconstitutionnalité d’une loi soulevée par un justiciable au cours d’une affaire. Le tribunal sursoit à statuer jusqu’à ce que la Cour donne son avis sur la question d’inconstitutionnalité d’une loi ou d’une procédure.

Mise en place et délais constitutionnels 

Les délais fixés par la Constitution, pour la mise en place de certains organes juridictionnels, pose de plus en plus de problèmes, étant donné le non respect de ces délais à l’instar du Conseil supérieur de la magistrature, qui est de 6 mois à compter de la date de la première élection législative ou celui de la Cour constitutionnelle dont la mise en place est fixée à un an à compter de cette même date.

Car ces délais fixés par l’article 148 de la Constitution ne sont nullement à titre indicatif, selon la plupart des observateurs. Ce sont des délais précis fixés de manière limitative par ceux qui ont rédigé la Constitution et qui l’ont adoptée.

Mohamed Salah Ben Aïssa, ministre de la Justice, avait indiqué aux médias que la touche finale a été mise au projet de loi sur la Cour Constitutionnelle.

Toutefois les choses sont constamment retardées et reportées.

Or la mise en place du Conseil supérieur de la magistrature est tributaire de celle de la Cour Constitutionnelle.

Le ministre avait déclaré qu’il n’y aura aucune transgression des délais constitutionnels et les procédures seront faites dans le cadre légal et le respect total de la Constitution.

Avec le dépassement des délais, rien ne va plus. Mohamed Ennaceur Le président de l’ARP, avait trouvé une « échappatoire » en déclarant dernièrement que les délais fixés par la Constitution ne sont pas à caractère limitatif, mais incitatif.

Que nenni ont répondu la plupart des juristes et membres de la composante civile, qui estiment au contraire que le fait même de dépasser les délais est contraire à la Constitution.

Cela incite à un certain laxisme qui peut aller au-delà du respect d’un simple délai, à d’autres chapitres importants de la Constitution, surtout concernant les articles qui laissent matière à interprétation.

Pour tout projet de loi, la commission de législation au sein de l’ARP a la charge de l’étudier de manière précise et méticuleuse, voire de procéder à sa révision complète, comme ce fut le cas pour le projet de loi sur le Conseil supérieur de la magistrature.

En attendant, la question des délais pose un dilemme et incite certains à parler de laxisme à dessein de différer les choses aux calendes grecques, sans tenir compte de l’intérêt du citoyen.

La mise en place d’une Cour Constitutionnelle inciterait nécessairement le législateur à réformer certaines lois qui sont contraire à la Constitution et aux principes des droits de l’Homme.

 

Par: Ahmed NEMLAGHI

Source: http://www.letemps.com.tn/article/91026/les-délais-de-mise-en-place-de-la-cour-constitutionnelle-laxisme-et-vide-juridique