Le coup de théâtre de Lotfi Zitoun

Fuente: 
La Presse
Fecha de publicación: 
02 Feb 2013

Comme annoncé, en scoop, sur ces mêmes colonnes, le 10 janvier dans l’article intitulé : «Des tractations et des doutes», Lotfi Zitoun quitte le navire. Le ministre conseiller auprès du Premier ministre a finalement plus de poids qu’on ne le pensait. Pour preuve, sa démission a suscité des commentaires et des interrogations et même une grande émotion.
Son départ et le timing posent ainsi plusieurs questions: s’agit-il d’une action préventive, genre quitter le navire avant qu’il ne coule ? S’agit-il d’un limogeage enrobé dans une honorable démission ? S’agit-il encore d’une prise de position, genre coup de gueule ?
Quoi qu’il en soit, et selon les bruits de coulisses parvenus à nos oreilles, le conseiller avait pensé le remaniement comme une large action de ralliement des forces politiques, et notamment de l’opposition. Sa proposition n’a pas eu d’écho ou n’a pas abouti. Considérant cela comme un échec personnel, Lotfi Zitoun a préféré tirer sa révérence.
Un tel geste commis  au moment où le Conseil de la choura, le puissant conseil des hauts dignitaires, tenait ses assises, est le signe qui ne trompe pas d’un conflit ouvert entre les différentes sensibilités du parti majoritaire, dont les divergences sont depuis un moment déballées sur la place publique.
Ce n’est un secret pour personne, en effet, que Lotfi Zitoun est un élément clé de l’équipe rapprochée de Rached Ghannouchi. Comme il est tout aussi connu que Hamadi Jebali est le chef d’une aile perçue comme plus modérée. La scission entre les deux clans et les crises répétitives ont tôt fait de disperser les troupes. Ils ne sont d’accord ni sur la politique générale, ni sur la relation avec les alliés, ni sur le remaniement, ni sur les nominations et autres révocations de leurs ministres. Les deux clans restent cependant unis pour le meilleur et pour le pire, et ce, dans l’intérêt de tous. Toutefois, cette guerre des chefs a participé un peu plus à l’isolement du parti au pouvoir, confronté à des crises de tous bords et déstabilisé par le désistement inattendu et ferme de ses partenaires de la Troïka.
Une fois que c’est dit, on n’a jamais connu le rôle exact de ce ministre conseiller, à la fois controversé mais très sollicité par les médias, qui a choisi depuis un certain moment de se faire plus discret. Ses apparitions médiatiques après quelques coups d’éclat visant spécialement les journalistes sont devenues plus rares. Quoi qu’il en soit, et comme il l’a laissé entendre à maintes reprises, il semblait extrêmement touché par les attaques personnelles dont il a fait l’objet, les considérant comme injustes.
Ainsi, le remaniement transformé depuis un moment en feuilleton fleuve trouvera d’ici peu son dénouement, espère-t-on. Il aura coûté quelques têtes, c’était prévisible. Maintenant, il faut savoir qu’au moment où nous mettions sous presse, Nourredine Bhiri, l’actuel ministre de la Justice, avait déclaré  à la chaîne TV El Moutawaset, proche du parti Ennahdha, que la démission de Lotfi Zitoun n’a pas été acceptée par le chef du gouvernement. Nous n’en serons pas ainsi à notre énième coup de théâtre.

 

H.H.

http://www.lapresse.tn/02022013/62054/le-coup-de-theatre-de-lotfi-zitoun.html