Parti Mostaqbel: Une troisième voie pour les Harratines

Source: 
C.R.I.DE.M.
Publication date: 
Jan 03 2013

Longtemps empêchés de voir le jour, pour cause de communautarisme présumé par les services du ministère de l’Intérieur, Mohamed Ould Borboss et ses amis de la dissidence APP, obtiennent enfin le droit légal à faire de la politique.

Le parti Mostaqbel dont le récépissé de reconnaissance vient de leur être délivré, constitue ainsi la troisième formation politique dirigée par les Harratines, même si ici et là, des dosages ethniques leur enlèvent cette marque communautariste interdite par la loi sur les partis en Mauritanie. La guerre peut alors commencer entre ces jeunes loups qui font siens les idées du courant "El Hor" et leur ancien maître à penser, Messaoud Ould Boulkheïr, celui qui les a formés et façonnés à la politique.

L’électorat Harratine servira ainsi dans les années à venir de champ de confrontation entre deux écoles de pensée que les ambitions ont jeté loin, les unes des autres.

Les services du ministère de l’Intérieur ont finalement délivré le récépissé de reconnaissance du parti Mostaqbal. Un parti politique créé par des dissidents du parti Alliance Populaire Progressiste (APP) du président de l’Assemblée Nationale, Messaoud Ould Boulkheïr. Ce dernier voit de plus en plus avec l’âge, son monopole sur la classe harratine se diluer sous le coup de boutoir de la concurrence, dont la dernière est celle née sous les cendres de ses anciens protégés. Est-il besoin de rappeler que la fissure au sein du parti APP est née d’une profonde déchirure idéologique.

Un cercle de fidèles avait en effet reproché à Messaoud Ould Boulkheïr son ramollissement face à la cause harratine et surtout, sa déviance par rapport à l’idéologie de base telle que portée dans les années 80 par le courant "El Hor" qui veut dire "Le Libre".

Un cri de ralliement des descendants d’esclaves qui luttèrent clandestinement à l’époque des pouvoirs d’exception pour la liberté des franges Harratines et leur participation pleine et entière en tant que citoyen libre à la vie de la Nation. Cela avait valu à ses leaders bien des emprisonnements et des procès, dont le plus célèbre reste le procès de Rosso.

La bataille ne fut pas vaine, car de ses produits figureront une loi contre l’esclavage en 1981 et les premières nominations de cadres harratines dans les postes de responsabilité. Messaoud Ould Boulkheïr sera nommé gouverneur puis ministre, Boubacar Ould Messaoud, directeur de la Socogim, pour ne citer que ceux-là.

Mais en 2010, la crise secouait toujours les rangs du parti APP, avec cette nostalgie jamais assouvie des Mohamed Ould Borboss, des Samory Ould Beye, qui ne retrouvaient plus dans ce parti refuge enlevé aux Nasséristes, la même verve prosaïque qui avait fait la grandeur du parti Action pour le Changement dissous et avant lui, le mouvement "El Hor". Un mot que Messaoud Ould Boulkheïr ne voulait plus entendre, le reléguant aux bancs de l’histoire.

Et ce fut la rupture. Les dissidents regagnèrent en masse la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD) sous la forme d’un mouvement baptisé "Comité de crise des anciens de l’APP ". Une appellation qui nourrira pendant longtemps l’ire mais aussi l’ironie de Messaoud Ould Boulkheïr. Un des aspects qui le fâcheront avec ses amis de la COD dont il n’appréciera pas la condescendance à accueillir sa propre dissidence. D’où son coup de colère qui le pousse a dans les bras du régime de Mohamed Ould Abdel Aziz dont il arma le bras pour abattre la COD.

En retour, le régime voulut blâmer cette dissidence en l’empêchant de naître. Ironie du sort, il semblerait que ce serait Messaoud Ould Boulkheïr lui-même qui arrachera à Mohamed Ould Abdel Aziz la reconnaissance du parti Mostaqbal. Pour que la bataille qui sera livrée soit plus juste et à arme égale.

Aujourd’hui, l’entrée officielle de Mostaqbal est perçu comme l’expression d’une volonté manifeste de la jeunesse harratine de se tailler une place dans l’échiquier politique national. Un défi lancé à Mohamed Ould Borboss, le nouveau chef de file de cette mouvance, mais aussi à ses compagnons, Sidaty Ould Demba, Mohamed Mahmoud Ould Oumarou, Saloum Vall Ould Valilou et autres Mamy Ould Ahmed.

 

Cheikh Aïdara

http://www.cridem.org/C_Info.php?article=638133