Marche de l'opposition, un pari gagné

Source: 
Cridem
Publication date: 
Jun 06 2014

Aux grands maux les grands remèdes. L’opposition après sa sortie au stade de la Sebkha, la semaine passée, a renoué avec la rue de façon spectaculaire. L’avenue Nasser était assiégée par aux moins 30.000 personnes, à 60% de jeunes. 

C’est la Mauritanie dans toute sa diversité qui était là, scandant son slogan : « gaat ine ! gaat ine ! Liyoom zerga raagdine ! », Ce qui veut dire : « nous boycottons ! Et le jour du vote nous dormons ». Comme pour faire marquer dans l’esprit des mauritaniens, son rejet d’une « mascarade électorale ». 

Ce second retour en force avait les allures d’un sondage auprès de l’opinion publique pour un important taux d’abstention. Le pari semble être réussi, par cette approche innovante dans les règles qui font marcher une république. 

Tout en revendiquant le caractère pacifique de sa démarche, l’opposition dite significative qui appelle à manifester dans tout le pays ne voudrait pas perdre la face, face à Aziz « barricadé » derrière l’occident qui compte tenu de la tension terroriste dans la sous région, verrait en lui l’homme du moment. Mais s’il reste sourd aux réprobations de tous ces manifestants, il aura fait preuve de cécité politique. 

Si aussi le vécu quotidien des mauritaniens, ne constitue pour lui une préoccupation, ce n’est pas un occident qui ne veut pas de l’émigration sur son sol, (une émigration que développe les conflits armées dans notre sous région), qui va lui dire de fouler du pied l’Etat de droit. 

Même si « l’occident est un accident » comme disait Roger Garaudy, le président en exercice de l’Union Africaine qu’il est, ne doit pas ignorer que c’est son continent qui de part ses immenses richesses est aujourd’hui le carrefour de toutes les destinations occidentales. Il ne faut jamais croire que le parapluie de la France où des Etats-Unis va vous accompagner dans la sérénité et la pérennité. Seuls leurs intérêts comptent pour eux.

Entre le respect où le rejet de cette élection de tous les enjeux, le regard des mauritaniens, est lointain ; elles(les élections) vont se passer en plein ramadan, avec des déplacements limités pour tous les électeurs, et donc toute possibilité de les voler à votre portée de main. Une éventualité qui n’est pas souhaitable, car lourde de conséquences, elle peut servir de « riposte» au camp d’en face qui comme le levain qui lève la pâte, va se dresser et la marche du 4 juin a déjà montré de par son ampleur qu’il y a une ligne à ne pas franchir. 

Nouakchott a donc gagné le pari du boycott, et si le même scénario devrait se reproduire dans les régions où les 17 partis du Front National pour l’Unité et la Démocratie –FNUD- sont présents, le président sortant pourrait sans le savoir travailler à faire élire un de ses quatre adversaires. Un second tour n’est pas à écarter. 

Avec les images de la marche qui vont faire le tour de la planète, c’est une opposition significative qui tient le bout d’une ficelle trop grosse face à un adversaire qui s’impose mais qui n’est plus l’heureux élu avec une « majorité » mise à nue par la rue.

Si la même détermination sans faille devait se faire sentir sur l’ensemble du territoire, il y a de quoi retourner à la table de négociations. Pourquoi pas ? Azizpourrait bien s’entendre avec ses adversaires et préférer lui aussi sortir par la grande porte, car le sort et le statut des anciens chefs d’Etat est l’un des critères de différenciation les plus importants entre les dictatures et les démocraties. 

En Afrique, depuis les années 80 jusqu’au printemps arabe, la place d’un ancien chef d’Etat était soit la tombe ou la prison ou l’exile. Avec la mobilisation monstre de la marche du 4 juin, c’est le peuple mauritanien, préoccupé par le retour d’une nouvelle vague de dérives qui appelle à la réconciliation nationale de tous les mauritaniens dans la richesse polychrome de l’arc en ciel. Le Président Azizpourrait en être l’artisan, c’est une question de bon sens. 

 

Source/Fuente: http://www.cridem.org/C_Info.php?article=657042