Gouvernement Tatam Ly : Une équipe qui a échoué

Source: 
Maliactu
Publication date: 
Mar 13 2014

Après les élections législatives de 2013 et la mise en place du bureau de l’Assemblée nationale, l’opinion nationale s’attendait à un changement de gouvernement pour tenir compte de la nouvelle configuration du paysage politique. Mais le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, en a décidé autrement. Il compte maintenir en place cette équipe gouvernementale. Conséquences : le Mali peine à sortir de la crise économique et sécuritaire, et les Maliens ne se font guère d’illusion quant à la capacité de changer la donne.

Le changement attendu n’est pas venu du gouvernement mis en place, le 8 septembre dernier. Cent quatre-vingt-six jours de tâtonnement et une absence totale de visibilité, sont quelques reproches faits au premier gouvernement d’Ibrahim Boubacar Keïta.  Le bilan est resté mitigé face aux nombreuses attentes du peuple malien.

Depuis son installation, le gouvernement Tatam Ly a posé quelques actes forts, mais qui ne suffisent pas à changer le quotidien des Maliens ou à booster l’économie nationale. Il y a eu les états généraux sur la décentralisation, les assises du nord ; quelques arrestations dans le cadre de la lutte contre la corruption et l’impunité. Et puis, c’est le vide !

Tenus du 21 au 23 octobre 2013, les États généraux de la décentralisation visaient à améliorer la gouvernance par l’approfondissement du processus de décentralisation pour un développement équilibré du territoire national. Ces assises  ont été réalisées dans un contexte particulier par le fait que le Mali sort d’une grave crise. Elles devraient ouvrir la voie à de belles perspectives pour les communes par, entre autres, l’effectivité des transferts de compétences et de ressources.

Un autre acte du gouvernement, les Assisses nationales sur le nord. Elles s’inscrivaient dans la perspective de refondation d’un nouveau contrat social entre les Maliens. Les assises nationales du nord avaient pour objet de réunir tous les acteurs de la nation pour identifier et corriger les défaillances structurelles de notre système politico-institutionnel afin de promouvoir une nouvelle gouvernance démocratique prenant mieux en compte les réalités profondes de notre société et l’aspiration fondamentale de changement nourri par le peuple malien dans tous les domaines pour un développement plus harmonieux et plus solidaire.

Elles auraient permis de proposer un nouveau modèle de la gouvernance à travers le renforcement des compétences des collectivités décentralisées et impliquant les légitimités traditionnelles locales tout en favorisant le contrôle citoyen ; de responsabiliser les acteurs communautaires sur les questions vitales suivantes : la préservation de l’environnement et du patrimoine, la lutte contre la criminalité transfrontalière, le terrorisme, les intégrismes religieux, le narcotrafic…

Des actions d’éclats…

Aussi, l’exécutif a marqué les esprits en procédant à l’arrestation de militaires qui ont fortement discrédité la République, par des actes criminels, des enlèvements et des agressions. L’arrestation du capitaine putschiste et sa bande a trouvé des échos favorables auprès des Maliens. Qui n’ont jamais compris les raisons de cette chasse à l’homme déclenchée dans notre pays par Amadou Haya Sanogo et ses complices.

Dans la lutte contre la corruption, on ne peut pas évoquer d’actes forts, mais plutôt de coups d’éclats d’un ministre qui veut de toute évidence se faire voir. Les arrestations enregistrées çà et là n’ont rien d’une volonté de mettre fin à la corruption. Elles ont tout l’air d’un règlement de compte.

Enfin, les changements opérés au sein de l’armée procèdent d’une politique qui a tendance à rassurer. Les putschistes ont été écartés de la gestion de la grande muette. Ils sont aujourd’hui visibles seulement au niveau du gouvernement à travers deux ministres. Ces quelques résultats ont été obtenus grâce à l’engagement de certains ministres dont Soumeylou Boubeye Maïga, Sada Samaké, Bokary Tereta, Abdramane Sylla.

D’autres ministres n’ont pas démérité. Ils ont pu tirer leur épingle du jeu. Ce sont, entre autres, Moussa Sinko Coulibaly, Dr Boubou Cissé, Mahamane Baby, d’Abdel Karim Konaté, de Fily Bouaré ou de Mme Jacqueline Togola.

Les autres ont fait de la figuration, et seraient sur des chaises éjectables. Car, depuis leur nomination, ils ont été incapables de proposer un seul projet de texte ou poser un acte sensé soulager les Maliens.

Kidal : toujours le statu quo

Face à ce résultat mitigé, il faut opposer les nombreuses attentes du peuple malien, notamment le règlement de la crise de Kidal ; la réduction des prix des produits de première nécessité ; la relance de l’économie nationale ; les réformes économiques et politiques ; la lutte contre la délinquance financière…

A Kidal, c’est toujours le statu quo. L’armée, avec un effectif taillé sur mesure, n’est pas libre de ses mouvements, une sorte de cantonnement qui ne dit pas son nom. Le gouvernement s’est montré impuissant. Pour preuve : le Premier ministre, Oumar Tatam Ly, a dû renoncer à une visite à Kidal à quelques kms de la capitale de la 8è région. C’est un échec cuisant.

Aussi, la réconciliation des Maliens doit dépasser les simples discours. Elle doit s’imposer comme une alternative. Depuis la signature de l’accord de Ouaga, sous la transition, le gouvernement Oumar Tatam Ly (OTL) a du mal à relancer les négociations entre l’Etat et les groupes armés. Et cela, malgré les injonctions de la communauté internationale. Les chances du gouvernement actuel de réussir une sortie de crise s’amenuisent jour après jour, surtout avec la crise qui se profile à l’horizon entre les membres du Mnla.

Même le projet de loi, déposé à l’Assemblée nationale pour la création de la Commission vérité et réconciliation, vient d’être renvoyé pour compléments d’informations. Le temps semble compter pour ce gouvernement. Et les députés risquent de précipiter sa chute.

Dans le sillage de la formation du gouvernement, en septembre dernier, des Maliens avaient d’ailleurs eu des doutes sur la capacité de l’équipe de OTL à relever certains challenges. Ces doutes s’expliquent par le fait que le gouvernement était composé dans sa majorité  d’amis et d’affidés de la famille présidentielle, mais aussi et surtout d’anciens ministres du premier mandat du président Konaré. « On ne peut faire du neuf avec du vieux », écrivions-nous à l’époque.

Gouvernement : au dessous de la moyenne !

Ensuite, le changement promis n’est toujours pas perceptible dans le quotidien des populations. Au contraire, les prix des denrées de première nécessité ont continué à grimper. L’argent a disparu parce que, dit-on, les investisseurs et les commerçants ont toujours des doutes. Conséquence : les affaires tournent au ralenti.

Même au niveau des marchés publics, des pratiques peu orthodoxes sont monnaie courante. Des marchés de plusieurs milliards de FCFA sont attribués au gré à gré. Une pratique illégale qu’on évoque dans un marché de près de 70 milliards de FCFA attribué à un fournisseur, devenu conseiller spécial du président de la République.

Partant de ces constats, si l’on doit noter le gouvernement Tatam Ly, 186 jours après sur la base des acquis et des échecs, il n’aura guère la moyenne. En effet, malgré le retour à l’ordre constitutionnel, le Mali est toujours dans une crise sécuritaire (occupation de Kidal, attaques de bandits armés, retour en masse de djihadistes dans le nord, etc.) et sous sérum économique.

 

Autor: Idrissa Maïga

Source/Fuente: http://maliactu.net/gouvernement-tatam-ly-une-equipe-qui-a-echoue/