Modibo Sidibé lors du 1er Congrès des Fare 2014

Source: 
Maliactu
Publication date: 
Mar 18 2014

Le parti Forces alternatives pour le renouveau et l’émergence (Fare-An Kan Wuli) a tenu son premier congrès ordinaire les 15 et 16 mars 2014 dans la salle Bazoumana Ba du Palais de la culture Amadou Ampahté Bah, pleine à craquer. Ce congrès a réuni les délégués venus de l’extérieur et de l’intérieur du pays et des six communes du District de Bamako. La cérémonie d’ouverture a été présidée par Modibo Sidibé, en présence de la présidente des Fare, Mme Traoré Oumou Traoré ; de la Secrétaire chargée des femmes, Mme Cissé Djita Dem ; du Secrétaire général de la jeunesse, Amadou Cissé et des représentants de plusieurs partis politiques amis. Nous vous proposons en intégralité le discours de Modibo Sidibé. Bonne lecture !

 

«Rendons grâce à Dieu, Lui qui nous donne l’heureuse opportunité de nous rassembler ici en ce jour qui marque l’ouverture du premier Congrès ordinaire des Forces alternatives pour le renouveau et l’émergence, Fare An Ka Wuli. Jour historique, parce que marquant une étape décisive dans le processus de consolidation et d’expansion de notre jeune parti. Je voudrais ensuite adresser mes chaleureuses salutations et mes remerciements à chacun d’entre vous, pour avoir répondu, si nombreux, à l’invitation du Secrétariat exécutif national des Fare à la cérémonie d’ouverture de son premier congrès. Votre présence à cette cérémonie est pour nous une formidable source de motivation, parce qu’elle est la confirmation de l’intérêt que vous n’avez cessé de porter aux Fare depuis plusieurs mois déjà. Nous vous en sommes très profondément reconnaissants.

Honorables Invités,

Mesdames et Messieurs,

Chers Compagnons,

Je voudrais également, avec vous, me réjouir du retour de notre pays parmi les Nations libres, et dire combien je suis fier de la formidable leçon de résilience et de pugnacité que notre peuple a su administrer au cours de ces quelques mois durant lesquels notre destin s’est trouvé compromis. La sortie de crise, définitivement consacrée par la tenue des élections générales, présidentielle et législatives, qui ont donné au pays de nouvelles institutions démocratiques, est d’abord la victoire du peuple malien lui-même qui a marqué ces instants décisifs de sa ferme volonté d’inscrire définitivement son destin dans une trajectoire démocratique. C’est aussi la victoire de la solidarité agissante de la communauté internationale et  du système des Nations Unies  à l’endroit de notre pays. Sans réserve, saluons encore et remercions le peuple de France de nous être venu en aide. Saluons également et remercions nos frères des pays de la Cédéao et du Tchad qui se sont engagés aux côtés de nos Forces armées  pour stopper l’aventure intégriste qui menaçait notre identité et notre existence en tant que Nation libre. Le Mali n’oubliera jamais.

Honorables invités,

Mesdames et messieurs,

Chers compagnons,

Aujourd’hui, notre peuple attend que l’Etat affirme son autorité, qu’il prenne ses responsabilités, et d’abord ses responsabilités en matière de sécurité et de défense du territoire. Il réclame le respect des lois, une justice égale pour tous. Il souhaite que le pays connaisse la stabilité, que l’action des autorités publiques soit transparente et contrôlable. Il veut un Mali et des Maliens dignes, respectueux dudambé, ce sens de l’honneur qui est un des fondements de notre culture.

 

Aujourd’hui, demeurent des défis clairement identifiés, et qui doivent mobiliser les énergies. Au nombre de ces défis, la restauration de l’Etat, un Etat fort qui s’appuie sur une administration compétente servie par des cadres ayant recouvré toute leur dignité d’agents publics au service de l’idéal républicain. En cela, ils ne doivent être soumis à aucune «pression politique», encore moins leur carrière qui ne doit obéir qu’à des règles et des principes préétablis dont le mérite.

Il nous faut donc changer notre perception de l’Etat, qui ne doit plus, qui ne sera plus ni le monopole d’un clan, ni l’affaire d’un seul homme.

Cette conception de l’Etat veut en effet que l’Etat soit au service de la Nation, comme la Nation l’est au service du citoyen. Un Etat qui assurera la sécurité des Maliennes et des Maliens, fort d’une armée reconstruite, d’une économie rétablie et d’une souveraineté reconquise de l’espace national.

Tant il est vrai, citation qui m’a un jour été rapportée que «le vrai patriotes s'inquiète, non du poste qu’il doit occuper dans la Patrie, mais du rang que la Patriedoit atteindre parmi les Nations».

Mesdames et messieurs,

Chers compagnons,

Il nous faut prendre également toute la mesure de la problématique de l’éducation et de la jeunesse.

En la matière l’effort du pays a été considérable, mais la qualité de notre système d’enseignement n’est pas à la hauteur des intelligences et des espoirs. Au moment où le Gouvernement se propose de revisiter notre système éducatif, il est capital d’impulser une dynamique dans laquelle l’exigence intellectuelle et morale deviendra la boussole de tous, élèves, étudiants et enseignants. Une attention particulière doit être accordée à l’enseignement supérieur et à la recherche, dont dépend notre capacité à nous développer par nous-mêmes.

Dans ce cadre, nous demandons que le Fonds de compétitivité pour la recherche scientifique et technologique soit suffisamment abondé  parce qu’il est essentiel de développer nos capacités d’innover, tant «l’innovation est la principale force motrice» pour réussir notre décollage économique.

Parce qu’en réalité, il est de notre responsabilité aujourd’hui de semer pour que demain, nos enfants puissent récolter et, à leur tour, construire pour ceux qui les suivront. Les bonnes intentions et les slogans proclamés la main sur le cœur ne suffisent pas. Il ne sert à rien de dire que chacun doit vivre libre si les moyens de sa liberté ne lui sont pas donnés. Et la liberté, c’est celle d’étudier, de se former, d’entreprendre, de travailler dans le pays où l’on est né.

Mesdames et messieurs,

Mes chers compagnons,

Toutes ces perspectives demeureront des leurres si nous n’arrivions pas à transformer les potentialités qui s’offrent au pays, en réelles opportunités de création d’emplois pour la jeunesse et de création de richesses pour le bien-être de nos populations. Réussir l’articulation entre l’agriculture, l’industrie, les services et le commerce, s’inscrit dans ce cadre.

Les disparités, les clivages, les inégalités entre régions et à l’intérieur même des régions devront peu à peu être effacés. C’est ainsi qu’il nous sera possible de donner un réel contenu à une nouvelle étape de la décentralisation fondée sur une plus grande responsabilité des régions dans le développement de leur potentiel économique.

C’est de la solidarité avec le développement local des services publics de santé, d’enseignement, de formation, de protection sociale. C’est de la fraternité entre toutes les composantes de notre peuple, engagées à égalité pour le développement de la nation, reconnaissant concrètement le bénéfice qu’elles tirent de notre unité. C’est de la citoyenneté, car de telles innovations ne peuvent vivre sans faire appel à la créativité et au travail des acteurs les plus divers.

Un nouvel élan de la décentralisation rapprochera les citoyens de l’administration et des ressources, avec des attributions accrues aux régions et des contrats de programme entre l’Etat et les assemblées régionales. L’unité nationale trouvera un nouveau souffle dans cette dynamique qui favorisera l’égalité de toutes les régions, soutenue par un schéma équitable d’aménagement et de développement des territoires.

Mesdames et messieurs,

Chers compagnons,

Prendre en main l’avenir immédiat du pays, c’est résolument donner toute la priorité à la résolution de la crise  au Nord. Notre combat, c’est de recouvrer  notre territoire, sauver notre Nation et les principes fondateurs de la République et de la Démocratie. Notre tissu social est fortement éprouvé, et risque de se trouver au bord de la rupture. Il nous faut donc prévenir, ne pas se tromper de combat et, surtout savoir, dans la justice, le pardon et la réconciliation, avoir l’humilité, la confiance, la volonté de ressouder, de bâtir notre avenir, parce qu’il n’y a d’avenir qu’ensemble.

Dans cette optique, les Maliens ont besoin aujourd’hui qu’on leur parle. Qu’on leur donne des raisons de  se mobiliser. Ils ont pareillement besoin de se parler, d’échanger, de se faire confiance, de bâtir ensemble. Ils ont besoin d’être acteurs de leur propre pays. Acteurs…et actrices.

Dans le processus de médiation en cours, le Mali, pour préserver  sa crédibilité internationale, doit s’inscrire dans l’application de l’Accord de Ouagadougou et ce faisant, éviter le risque de nous isoler dans notre communauté économique  régionale d’ancrage.

Toutefois, autant notre pays se doit de diligenter les négociations nécessaires, autant la communauté internationale doit lui donner le temps qu’il faut pour identifier tous les acteurs impliqués dans la recherche de la paix.

 

La mise en œuvre des politiques axées sur la reconstruction, la réhabilitation des services sociaux de base doit être soutenue.

C’est par des projets structurants que les populations prendront la mesure de la présence qualitative de l’Etat et l’expression de la volonté nationale de trouver une solution viable à la  crise.

Enfin, la crise sécuritaire et institutionnelle que nous traversons doit nous incliner davantage à l’élaboration d’un projet national sur la gestion de nos régions et au-delà de la diversité dans notre pays.

Que personne ne se trompe, nul ne se sauvera sans l’autre ! Les menaces sont communes, les ripostes doivent l’être. Il nous faut réinventer solidarités  et partenariats stratégiques entre et avec les pays du champ, de la Cédéao, l’Union africaine et, bien entendu, avec les pays occidentaux. Dans cet esprit, le processus de Nouakchott est une étape importante.

Mesdames et messieurs,

Chers compagnons,

Nous devons être fiers de ce que nous avons réussi. Nous avons été au contact du peuple pour nous alimenter de ses expériences, de ses revendications, de ses espoirs. C’est votre engagement et votre enracinement dans le Mali réel qui ont rendu possible ce fabuleux parcours des Fare.

J’ai insisté, dans mon programme et tout au long de la campagne électorale, sur la profondeur des enjeux devant lesquels nous sommes placés. J’ai dit que le modèle économique et institutionnel issu de nos indépendances était épuisé, qu’il fallait changer de modèle. Cela touche en premier lieu à notre façon de faire de la politique. Nous devons en changer.

Comme tous les Maliens, je souhaite ardemment que notre nouveau président, mon aîné Ibrahim Boubacar Kéïta, réussisse la transition dont notre pays a besoin et il peut compter sur moi pour l’y aider, chaque fois que nos objectifs convergeront. Mais, sans me défaire du respect qui lui est dû,  je lui dirai aussi ce qui, dans nos visions, diffère.

Je lui dirai par exemple qu’en matière de lutte contre la corruption, les appels à la tolérance zéro ne suffiront pas et risquent fort de décevoir. La répression certes utile ne suffira pas. Le mal est structurel. Seul un travail de fond et de longue haleine pourra l’extirper.

Cependant, gardons-nous de ne donner du Mali que l’image d’un pays perdu du fait de la corruption généralisée, où le souci de l’intérêt général a déserté les agents publics, voire les citoyens ! Regardons autour de nous et nous allons voir dans tous les secteurs de la vie sociale des Maliennes et des Maliens honnêtes, travailleurs, qui mettent en œuvre un autre fonctionnement. Identifions ces pôles de bonne pratique, mettons-les  en réseau, pour en faire une force, suffisamment attractive pour rendre aux Maliens la confiance dans leurs valeurs et dans leurs capacités. Notre conviction est que dans mille situations concrètes les maliens savent être grands, honnêtes et solidaires !

Je lui dirai que la neutralité politique de l’armée, de l’administration, de la religion est un trésor sur lequel nous devons veiller comme sur la prunelle de nos yeux. L’armée nous protège tous. L’administration nous sert tous. La foi nous réunit presque tous.  Ne les mêlons pas à nos légitimes différends politiques.

Je fais crédit à notre Président de sa capacité à rétablir une armée républicaine, à maintenir une République laïque, à développer un service public équitable. J’y contribuerai autant qu’il me sera possible, mais je m’opposerai à toutes les compromissions susceptibles d’entraîner notre pays dans les divisions qu’on voit déchirer plusieurs pays du continent.

Mesdames et messieurs,

Chers compagnons,

Nous devons rendre toute leur place aux idéaux pour lesquels nous agissons. Notre vie politique donne bien souvent le sentiment que nous nous battons pour des hommes, pour des places, avant de nous mobiliser pour une certaine idée de notre vie en société. Il y a bien sûr des convergences possibles entre les différentes forces politiques, mais il y a aussi des oppositions. Nous ne nous réclamons pas par exemple de la doctrine politique qui considère qu’on doit laisser le maximum de place au marché et aux intérêts privés. Nous pensons que dans nos jeunes Républiques, l’intérêt général et la solidarité sociale doivent être fermement assurés par des institutions, certes profondément rénovées, mais puissantes. Voilà pourquoi nous nous réclamons de la sociale- démocratie.

J’ai beaucoup de connivence avec les principes qui ont présidé à la fondation du Mouvement démocratique et des liens amicaux et fraternels m’unissent à nombre de ses membres. Mais ce mouvement historique n’a pas su résister aux divisions et parfois aux trahisons qui l’ont affaibli et qui ont brouillé son image. Je suis convaincu qu’une force nouvelle est nécessaire pour retrouver la pureté des origines et rendre aux militants de la démocratie malienne le goût de ce grand combat.

Seule la création d’un nouveau pôle politique est à même de répondre à cet enjeu. Les Fare, seconde génération de parti politique, porteuses d’une nouvelle génération d’hommes politiques, travaillent à l’émergence d’un tel pôle pour le devenir de notre République et de notre Démocratie.

Si nous voulons faire triompher ces idéaux, il nous faut impérativement créer une force politique d’un type nouveau. Une force politique qui ne cherchera pas à acheter les consciences, mais à les convaincre.

Une force politique qui respectera ses engagements.

Une force politique suffisamment ancrée dans ses principes pour résister à la tentation des bons postes à tout prix.

Une force politique efficace, bien organisée, capable de mener campagne dans tout le pays. Tous les individus, toutes les organisations grandes ou petites qui partagent ces vues sont les bienvenus.

Voilà mes chers amis, les pistes que je vous propose pour que nous construisions ensemble le nouveau pôle politique dont notre Mali a besoin. Ce n’est pas une tâche pour demain, ni pour après-demain, c’est une tâche pour tout de suite.

Il nous faut rester unis et solidaires, et garder foi en notre projet. Ce que vous avez réussi en si peu de temps est énorme. Il nous faut poursuivre l’effort et, par l’exemple et par l’action, convaincre de la pertinence de la voie que nous avons choisie.

Ici et maintenant, c’est l’appel que je formule à ceux de nos compagnons qui ont choisi de prendre un autre chemin et, en ce jour où nous consolidons notre parti, ont décidé de ne pas être là parmi nous, à la place qui est la leur.

Mes  Chers Compagnons,

Nos efforts devront se concentrer sur le renforcement des FARE et sur ses capacités à maintenir les liens avec les mouvements et associations, pour en faire une coalition capable de porter notre projet et d’en promouvoir les idéaux. Cet effort de structuration nécessitera la participation de tous, dans le cadre d’une démarche inclusive où nul ne sera laissé de côté, parce que nous avons besoin de l’engagement de tout un chacun, de l’expérience de chacun. Toutes les personnes, toutes les organisations grandes ou petites qui partagent ces vues sont les bienvenues.

En vous remerciant très sincèrement de votre engagement qui nous a valu ce parcours honorable lors des élections présidentielles et législatives, je voudrais dire à toutes et à tous que nous avons ensemble commencé une aventure qui n’en est qu’à ses débuts. Il ne faut pas s’arrêter. Il nous faut continuer ensemble, jusqu’à la victoire de nos idéaux».

 

 

Source/Fuente: http://maliactu.net/modibo-sidibe-lors-du-1er-congres-des-fare-2014-notr...