Le pouvoir risque de dialoguer avec lui-même

Source: 
El Watan
Publication date: 
May 20 2014

Après la défection de partis et de personnalités politiques, Ali Benflis déclare son refus d’aller rencontrer Ahmed Ouyahia.

A lors que Abdelaziz Bouteflika fait des appels du pied en direction de l’opposition, le projet des consultations politiques que doit mener, début juin, Ahmed Ouyahia, risque d’être compromis. Habitué aux décisions solitaires, le pouvoir risque de se retrouver à jouer un monologue où même le public ne sera pas présent. Après la défection des partis et personnalités regroupés dans la Coordination pour les libertés et la transition démocratique, c’est au tour de Ali Benflis de déclarer son refus d’aller rencontrer Ahmed Ouyahia.

Et une grande partie des formations politiques réunies dans les Forces de changement ont emboîté le pas à l’ancien Premier ministre (lire ci-contre l’article). Tandis que d’autres ont affiché leur intention d’aller tenter leur chance du côté du palais d’El Mouradia. Mais cela ne risque pas de changer grand-chose à la donne. L’ancien ministre de la Communication, Abdelaziz Rahabi, un proche de Benflis, voit dans le texte proposé par Abdelaziz Bouteflika comme un «réaménagement dont l’autorité est confiée à des experts alors qu’il aurait été plus judicieux de ne faire intervenir les spécialistes et experts qu’après une large concertation et un franc accord politique». Du côté des personnalités contactées, aucune figure de poids n’a encore répondu favorablement aux appels du pouvoir. Mouloud Hamrouche, très attendu après avoir brocardé le système, qu’il estime en «fin de cycle», hésite encore.

Lors d’un débat organisé par le Rassemblement Action Jeunesse (RAJ), l’ancien chef de gouvernement a affirmé qu’il ne savait pas s’il irait aux consultations de Ouyahia ou non. Mais son discours est plus offensif que jamais.
Le pouvoir est tellement isolé que même l’ancien responsable du FIS dissous, Abdelkader Boukhamkham, s’est permis de décliner l’invitation d’aller discuter de la révision de la Constitution. S’il est difficile de cerner l’identité des 150 invités aux consultations de Ouyahia, rares sont en tout cas les partis politiques et les personnalités qui ont répondu favorablement à cette offre de dialogue.

Seule la clientèle…

En dehors de l’empressement évident des partis du pouvoir, seuls les formations comme le PT de Louisa Hanoune et le FNA de Moussa Touati ont d’ores et déjà décidé d’aller faire leurs propositions. Ces deux partis sont connus pour être de vrais «opposants» à la politique de la chaise vide.La réaction la plus étrange est venue des anciens cadres du FIS dissous. Une bonne partie de ces dirigeants ont reçu l’inespérée invitation de dialoguer avec le pouvoir. Ils n’ont pas hésité à dire «oui» avant même de prendre connaissance du contenu de la mouture envoyée par Abdelaziz Bouteflika pour «lecture».
Ce qui est plus étrange, c’est que ces dirigeants islamistes ont été invités à une messe où des défenseurs des droits de l’homme (à l’image de l’aile de la Ligue algérienne de la défense des droits de l’homme) ont été exclus. Bizarre pour «un consensus national»...  
Toujours côté islamiste, Abdelmadjid Menasra a fait une insolite intrusion dans le débat public en acceptant l’invitation de Ouyahia.

Plus que cela, le chef du parti Ettaghyir (le changement) s’est même permis de s’attaquer à l’opposition, qu’il qualifie d’«égoïste». Malgré ces réponses favorables, le pouvoir se retrouvera certainement devant une table de discussion dégarnie. Abdelaziz Bouteflika, à qui on prête l’intention de faire adopter la nouvelle Loi fondamentale par la seule voie parlementaire, n’aura certainement pas «le consensus» qu’il cherche. Mais telle ne semble pas être la priorité. Cette dernière étant d’appliquer une feuille de route tracée d’avance. Quitte à rater une nouvelle fois le train de l’histoire.
 

Autor: Ali Boukhlef

 

Source/Fuente: http://www.elwatan.com/actualite/le-pouvoir-risque-de-dialoguer-avec-lui...